Micheline Calmy-Rey

Combien de commentaires n’ai-je pas lus ou entendus, au cours de ma carrière politique, concernant mon style vestimentaire ou ma coiffure. Mon sac à main était-il bien assorti à ma tenue? Mes chaussures étaient-elles judicieusement choisies? Autant de questions que l’on ne pose pas, ou si rarement, lorsqu’il s’agit d’un homme.

Début juillet 2011, au terme de l’excursion annuelle du Conseil fédéral, des photographes ont demandé aux quatre femmes membres du Conseil fédéral de poser ensemble, ce que nous avons bien volontiers accepté. J’ai dû constater par la suite que cette belle photo a donné lieu à une comparaison et à un classement de nos «looks» respectifs. Inutile de préciser que nos collègues hommes n’ont pas été soumis à pareil traitement.

Il est dommage qu’aujourd’hui encore, à l’heure où, pour la première fois, le Conseil fédéral compte une majorité de femmes, on porte trop souvent sur les femmes occupant des postes à responsabilités un regard marqué par des stéréotypes. Un comportement que l’on qualifierait chez un homme de «direct», «déterminé» ou «énergique» risque fort d’être qualifié d’«autoritaire», d’«hystérique» ou de «froid» dès lors qu’il s’agit d’une femme.

Les femmes occupant des positions de pouvoir remettent en cause l’image traditionnelle de la femme douce et passive, s’exposant ainsi à des conséquences négatives. C’est la raison pour laquelle il est important que des femmes de plus en plus nombreuses revendiquent et occupent des postes à responsabilités et qu’elles investissent les instances de décision économiques et politiques. Et c’est la raison pour laquelle je me suis tant réjouie que, pour la première fois dans l’histoire de la Suisse, quatre des sept membres du Conseil fédéral soient des femmes. De tels symboles sont importants pour encourager les jeunes filles et les jeunes femmes à assumer des responsabilités et du pouvoir.

Au Département fédéral des affaires étrangères, le pourcentage de femmes parmi les cadres est de 30%; si l’on considère plus particulièrement la Direction du développement et de la coopération, il se monte à 40%. Par contre, on ne trouve que 10% de femmes parmi les ambassadeurs et ambassadrices. Afin de remédier à cette situation, nous veillons depuis plusieurs années à une répartition équilibrée des candidatures à la carrière diplomatique, ce qui nous rapprochera progressivement de l’égalité s’agissant des postes d’ambassadeurs et d’ambassadrices.

Au niveau international également, il est reconnu que les comportements discriminatoires – lorsque, par exemple, les filles sont exclues du système éducatif ou en sont retirées dès leur plus jeune âge – et les stéréotypes négatifs liés au genre font obstacle à un accès égal des filles et des garçons à l’éducation et constituent par conséquent une cause importante de pauvreté.

Une chose est sûre: la société tout entière, les hommes autant que les femmes, aurait beaucoup à gagner si l’égalité des chances devenait une réalité. Nous devons continuer à nous engager en ce sens.

Automne 2011